21 janvier 2021

8h15 - l'interview politique - Sonia Mabrouk
"L'Etat devient berger et nous un peuple moutonnier", affirme Mathieu Laine

"C'est ahurissant quand on y pense de devoir remplir une auto-attestation pour faire le tour de son pâté de maison", remarque jeudi sur Europe 1 l'essayiste Mathieu Laine. Pour lui, la crise sanitaire sanitaire a exacerbé l'omniprésence de l'Etat en France, ôtant aux citoyens libertés et responsabilités individuelles. 
INTERVIEW

"L'Etat nous parle comme à des enfants." Mathieu Laine, essayiste auteur d'Infantilisation, cet Etat nounou qui vous veut du bien, aux éditions de la Cité, qualifie de "préoccupante" l'omniprésence des décideurs politiques dans la vie des Français. Un phénomène renforcé par la crise sanitaire qui contribue de fait à leur ôter libertés et responsabilités individuelles. "C'est ahurissant quand on y pense de devoir remplir une auto-attestation pour faire le tour de son pâté de maison. Ou de recevoir une amende parce qu'on l'a remplie au crayon à papier", remarque l'essayiste. 

"On a géré cette crise malgré nous plutôt qu'avec nous"

Il pointe du doigt le fait que le président et ses ministres s'adressent aux citoyens en répétant "en permanence" les mêmes messages de base, "comme à des enfants". "On utilise des mots infantilisants comme 'papys' et 'mamies'. Je trouve ce changement de langue préoccupant." Autre exemple : les débats interminables qui ont abouti à la définition des biens essentiels ou non. "Il a fallu prendre un décret pour autoriser la vente des sapins, mais on n'avait pas le droit d'acheter les décorations. Ce délire a fait qu'à la fin, on a géré cette crise malgré nous plutôt qu'avec nous."

 

"Il faut sortir de cette logique de précautionnisme"

Un phénomène pernicieux, dit Mathieu Laine, car "à force de réduire les libertés et les responsabilités de chacun, on est gouverné par la peur". Pour lui, ce mécanisme pousse finalement les citoyens à se tourner eux-mêmes vers l'Etat pour décider à leur place. "L'Etat devient berger et nous un peuple moutonnier." Il craint que le peuple ne s'habitue à déléguer son pouvoir et ses décisions. "Il y a une logique perverse dans l'infantilisation, c'est l'addiction à la régression. C’est agréable, confortable, de laisser tout décider par d’autres. Mais il faut sortir de cette logique de précautionnisme."

La prochaine campagne présidentielle est donc lui l'occasion de se "réapproprier" nos libertés, en demandant à tous les candidats de se positionner sur le sujet. Dans son dernier ouvrage, Mathieu Laine évoque l'idée d'un "Etat enchainé" dont le rayon d'action serait clairement défini et surtout limité. "Pour l'instant, l'Etat est partout. A un moment donné, il faudra le faire rentrer dans son lit."

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